Il y a exactement 70 ans, 79 personnes, principalement membres du personnel médical et paramédical de l’Hôpital Hadassah de Jérusalem, sont massacrées le 13 avril 1948, soit 4 jours après la mort de 100 à 120 Palestiniens à Deir Yassin.
C’est l’un des événements les plus marquants de l’histoire de la Guerre d’Indépendance d’Israël et il est à regretter qu’il soit si peu connu. Rappelons que ce massacre a été perpétré entre le moment où l’Assemblée Générale de l’ONU s’est prononcée le 29 novembre 1947 pour le partage de la Palestine en deux États, l’un juif, l’autre arabe, et celui de la proclamation de la naissance de l’État d’Israël, le 14 mai 1948.
Le Mont Scopus, où sont situés l’Hôpital Hadassah et l’Université Hébraïque, est alors une enclave juive isolée entourée de villages arabes hostiles. L’approvisionnement de l’hôpital est de plus en plus problématique en raison des multiples attaques qui ont lieu sur la route qui y mène. En conséquence, la Haganah met en place une escorte militaire afin de protéger les autobus que le personnel de l’hôpital emprunte pour aller travailler sur place.
Le 13 avril 1948 à 9h, dans la rue Rehov Solel (aujourd’hui Rehov Havatselet), 105 hommes et femmes embarquent dans un convoi à destination du Mont Scopus, situé à exactement 4 kilomètres.
Ce convoi comprend 10 véhicules avec en tête une automitrailleuse suivie d’une ambulance blanche arborant le symbole du Magen David Adom, deux autobus, une autre ambulance, quatre camions et une deuxième automitrailleuse protégeant l’arrière du convoi.
Parmi les passagers du convoi, se trouvent un ophtalmologue mondialement connu, le Dr. Haïm Yassky, Directeur Général de l’Hôpital Hadassah, avec son épouse Fanny, et les Professeurs Leonid Doljansky et Moshe Ben-David qui ont fondé la Faculté de Médecine de Jérusalem.
Il y a aussi Hanna Cassouto, survivante italienne de la Shoah qui se rend à son laboratoire afin de poursuivre ses travaux de recherche en anatomopathologie.
Sont présents le dermatologue Haïm Cohen, le gynécologue Bruno Bercowitz et le physicien Guenther Wolfsohn. Également à bord : Batya Bass, 43 ans, en fin de grossesse de son quatrième enfant, et Esther Passman Epstein, une jeune Juive américaine, Directrice des services sociaux de l’Institut du Cancer.
Au poste de contrôle de police de Mea Shearim, le responsable britannique Robert J. Webb affirme au responsable du convoi que la voie est libre. C’est donc en toute confiance que les véhicules s’engagent dans le quartier arabe de Sheikh Jerrah, jusqu’à ce que le véhicule de tête saute sur une mine à 9h30, sur la route de Naplouse.
Cinq véhicules réussissent à échapper à l’embuscade, mais les cinq autres, notamment deux autobus bondés, sont pris au piège dans un déluge de balles et de cocktails Molotov.
Tous les hommes et femmes sont massacrés sans que les soldats britanniques n’interviennent, en dehors du Colonel Jack Churchill qui réclame enfin de l’aide à 10h30. Il téléphone à de multiples reprises au Q.G. de l’Armée Britannique de Jérusalem afin qu’on lui permette d’envoyer sur place un peloton d’automitrailleuses des Lifeguards, et qu’on lui donne l’autorisation de se servir de mortiers de trois pouces afin de dégager les véhicules. Mais l’autorisation ne vient jamais malgré ses appels incessants.
Le convoi subit alors l’attaque de vagues de combattants arabes qui crient : « Minshan Deir Yassin ! » (« Pour Deir Yassin »). Des toits, des terrasses, des balcons, du Mont des Oliviers et du Mont Scopus, de la Colline du Mauvais Conseil et même des fenêtres du siège du Gouverneur où se trouvait le Général Mac Millau, la moitié de Jérusalem assiste à l’agonie du convoi assiégé.
L’ambulance et les bus s’embrasent après avoir été criblés de cocktails Molotov. Mais les Britanniques n’interviennent pas, même lorsqu’ils entendent les cris des hommes et femmes qui les implorent de les sauver.
Comme l’explique le Docteur Avraham Freiman, l’absence de réaction des Britanniques donne du courage aux combattants arabes. Il faut attendre 15h30 pour que le Haut Commandement britannique donne l’ordre aux forces qui se trouvaient sur place, d’intervenir vigoureusement. Six longues heures pour que les Anglais interviennent.
Quand ils arrivent enfin, ne subsistent que des véhicules calcinés et des corps mutilés.
Dans leur célèbre « Ô Jérusalem », Dominique Lapierre et Larry Collins écrivent :
« Que ce soit par une incroyable lenteur à réagir, par désir de punir la communauté juive pour Deir Yassin, par pure sottise, ou par des complicités à un quelconque échelon de la hiérarchie, les Anglais allaient se rendre coupables de l’énorme retard mis à secourir le convoi ».
Dr. Jonathan Taïeb, Responsable de Hadassah Jeunes & Secrétaire Général de l’AMIF