Même les chirurgiens de la main les plus expérimentés de l’Hôpital Hadassah n’avaient jamais été confrontés à une telle situation : avec leurs crevasses incrustées, les mains de ce patient semblaient avoir été métamorphosées en branches d’arbres.
Le Docteur Michael Chernofsky, chirurgien microvasculaire de la main à Hadassah, a rencontré pour la première fois Mohammed Taluli, un Gazaoui de 42 ans, qui est entré dans sa clinique pour bénéficier d’un avis médical.
« C’est une maladie très rare, qui ne possède aucune documentation dans les ouvrages médicaux », explique le Dr. Chernofsky. « Ce patient a eu de nombreuses tumeurs complexes qui ont peu à peu recouvert ses mains, il a souffert de douleurs terribles, de l’incapacité d’utiliser ses mains et du regard des autres » poursuit-il. « Sa maladie était également très dangereuse et aurait pu se transformer en cancer », précise ce médecin.
Parfois nommée syndrome de l’ « homme de bois » ou de l’ « homme-arbre », cette maladie est une complication du HPV, le papillomavirus humain. « Dans la plupart des cas le système immunitaire peut faire face au virus ou, dans le cas contraire, les patients peuvent être soignés par des médicaments » ajoute-t-il. « Cependant le système immunitaire de M. Taluli ne pouvait pas faire face et le virus s’est développé de façon incontrôlable », affirme le Dr. Chernofsky.
Il raconte par ailleurs qu’il n’avait entendu parler qu’une seule autre fois d’un tel cas clinique, au Bangladesh.
La décision d’opérer M. Taluli a été prise en concertation avec son confrère, le Docteur Shai Luria, également chirurgien de la main à Hadassah. « Nous devions apporter une solution pour réduire la possibilité que les tumeurs soient hors de contrôle », rapporte le Dr. Luria. « Il était également important de travailler en étroite collaboration avec une équipe de dermatologues et le personnel de la salle d’opération pour s’assurer que nous n’allions pas être infectés par cette maladie hautement contagieuse », poursuit-il avant d’ajouter : « nous avons travaillé avec un double blindage et des masques spéciaux, et nous avons choisi de ne pas brûler les tumeurs parce que cela aurait entrainé une propagation de fumée infectieuse ».
L’élimination chirurgicale des excroissances a été conjuguée à des greffes de peau, à un traitement spécifique et à un vaccin spécial administré par le dermatologue, le Docteur Vered Molho-Pessach. Les traitements ont désormais laissé place à un cycle de rééducation afin que M. Taluli puisse retrouver l’usage de ses mains.
Père de six enfants, M. Taluli se souvient de son combat initié il y a plus de 10 ans, pour trouver une solution à sa maladie : « Nous avons essayé de trouver un traitement en Égypte mais il n’y avait rien à faire là-bas ». Il a ensuite tenté sa chance à Naplouse et à l’Hôpital Makassé de Jérusalem-Est, en vain. « Ils m’ont alors recommandé de me rendre à Hadassah » précise-t-il avant de poursuivre : « Après des années où je suis resté assis chez mois, incapable de travailler à cause de l’état de mes mains et de peur d’avoir un cancer, les experts ici à Hadassah ont été les seuls à me redonner de l’espoir ». Et de conclure « Le traitement que je reçois ici est excellent et me permet de penser que tout cette histoire n’est déjà plus qu’un lointain souvenir ».